Y a-t-il un âge à partir duquel on ne peut plus apprendre? En vieillissant, doit-on laisser de côté ses rêves de parler une autre langue, de comprendre la politique américaine ou de pratiquer un instrument de musique? Steve Kaufmann, alias lingosteve, est un polyglotte parlant plus de 20 langues bien connu sur YouTube. Sa particularité est qu’il a appris la plupart de ces langues après sa retraite. Impossible, croyez-vous? Un des mythes les plus tenaces à propos du vieillissement est qu’à partir d’un certain âge, il devient impossible d’apprendre de nouvelles choses. Pourtant, la retraite est un moment privilégié pour faire de nouveaux apprentissages, et plusieurs recherches en démontrent les bienfaits.
Le principe actif de la mémoire
En 1949, le neuroscientifique Donald Hebb, professeur à l’Université McGill, avance une des théories les plus importantes de l’histoire des neurosciences. Cette théorie énonce un principe simple : plus un réseau de neurones est sollicité, plus il tend à se maintenir. À l’inverse, un réseau non sollicité ne sera pas maintenu inutilement.
Selon cette théorie, notre cerveau utiliserait les chemins qu’il s’est déjà frayés avec facilité, tout en les réactivant continuellement pour qu’ils demeurent utilisables. Plutôt que de la voir comme une boîte où l’on range ses souvenirs, on peut donc imaginer la mémoire comme une courtepointe qu’il faut continuellement tisser et retisser.
Une autre image éloquente serait de comparer notre esprit à une montagne sur laquelle on emprunte des sentiers. Si défricher la forêt pour créer un nouveau sentier est difficile, il devient de plus en plus facile de circuler sur ce même sentier lorsqu’on y marche régulièrement. À l’inverse, les sentiers abandonnés se laissent peu à peu envahir par la végétation.
Les effets de l’âge, qui ralentissent naturellement l’accès à l’information, sont souvent confondus avec un ralentissement des apprentissages. Pourtant, même si nous avançons un peu moins vite sur les sentiers, notre mode de fonctionnement demeure le même. En effet, le cerveau humain est constamment en train d’apprendre de nouvelles choses ou de réapprendre ce qu’il sait déjà. Autrement dit, nous sommes naturellement conçus pour apprendre, et ce processus ne s’arrête pas en vieillissant!
Quelques conseils pour favoriser l’apprentissage
Même si nous ne perdons pas nos capacités intellectuelles avec l’âge, celles-ci peuvent devenir un peu plus capricieuses. L’Institut universitaire de gériatrie de l’Université de Montréal donne à cet effet quelques trucs et astuces pour profiter au maximum de la retraite pour apprendre.
Lorsqu’on comprend son fonctionnement cérébral, il est possible de trouver des stratégies pour compenser les effets du vieillissement. Par exemple, si on éprouve des problèmes de concentration, on peut privilégier certaines heures de la journée pour étudier, intercaler une activité physique, comme la marche, le vélo ou la natation, avec des séances d’apprentissage et limiter les distractions, comme les écrans. Si c’est notre mémoire qui fait des siennes, des techniques comme une meilleure utilisation des notes et d’un agenda peuvent nous être d’un grand secours.
Surtout, ne vous laissez pas avoir par la culpabilité et ne cédez pas aux préjugés sur le vieillissement. Des personnes de tout âge peuvent rencontrer ce genre de défis. Les troubles de concentration et d’apprentissage sont d’ailleurs aujourd’hui endémiques chez les moins de 20 ans, une réalité qui interpelle les spécialistes et qui serait provoquée par la trop grande sollicitation de l’attention par les écrans et les réseaux sociaux. À chaque génération ses défis!
Des effets bénéfiques à l’apprentissage continu
Continuer d’apprendre de nouvelles tâches, de rencontrer de nouvelles personnes et d’acquérir de nouvelles connaissances permet de retarder le déclin neurocognitif et de prévenir l’apparition de certaines maladies dégénératives. C’est aussi, tout simplement, une manière de profiter de la vie.
L’apprentissage ne relève pas seulement de l’étude ou de la lecture : les intelligences spatiale et émotionnelle sont aussi des éléments clés pour un bon régime d’entretien de notre cerveau. Apprendre un nouveau sport, de nouvelles techniques de travail manuel, rencontrer des gens et être à l’écoute des autres sont autant de manières d’entretenir et de défricher de nouveaux sentiers pour nos neurones.
Pour les résidents et résidentes du Marronnier, s’inscrire à un loisir, apprendre à jouer à un jeu de société ou chanter en chorale en compagnie d’autres comparses sont des activités tout indiquées pour stimuler le cerveau.
De nouvelles avenues pour continuer d’apprendre en vieillissant
Lorsqu’il s’agit de s’éveiller à de nouveaux apprentissages, les nouvelles technologies offrent des avenues remarquables et une foule de ressources dans lesquelles puiser.
Les réseaux sociaux
Grâce aux réseaux sociaux, il est désormais facile de se rassembler autour de nos passions. Pensez à des groupes Facebook comme « Ornithologie du Québec » ou le « Cercle des mycologues amateurs de Québec », qui offrent une foule de ressources pour les passionnés d’ornithologie ou de cueillette des champignons. Des groupes semblables existent pour tout, de la pâtisserie au barbecue, en passant par le tricot et le rock progressif!
L’Université du troisième âge
Le milieu universitaire dispose d’un bon réseau de formations destinées aux personnes retraitées. Avec l’Université du troisième âge (UTA), vous pouvez suivre des programmes de formation continue en ligne sur des sujets aussi variés que la philosophie du langage, la musique de Mozart ou l’histoire du Québec et du Canada. Pour les plus ambitieux, de prestigieuses universités comme Harvard ou Cambridge offrent aussi désormais des cours et des programmes en ligne.
Apprendre des langues en ligne
Le cas du YouTubeur Steve Kaufman (en anglais seulement) permet de déboulonner un dernier mythe, soit celui qu’une personne puisse être trop vieille pour apprendre une langue. De nombreuses études révèlent au contraire que dans l’apprentissage d’une langue, l’âge compte beaucoup moins que le temps qu’on y consacre. Avec Internet, certains sites et applications permettent d’être en contact facilement avec des locuteurs de partout dans le monde. De quoi pratiquer aussi souvent et aussi longtemps qu’on le désire!
Apprendre l’italien, le mandarin, le tricot ou le piano… quel sera votre prochain projet de retraite?
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